La Cellule d'Intervention Metamkine est formée de Christophe Auger, Xavier Quérel et Jérôme Noetinger. Leurs performances allient projections 16mm et musique électroacoustique, dans la grande tradition du "cinéma élargi". Depuis 1987, ils ont présenté leur travail dans plusieurs festivals, cinémas, galeries et espaces indépendants, en France, Europe, Canada, Etats-Unis, Japon et Australie. Ils ont également développé des collaborations avec d'autres groupes comme Nachtluft, Voice Crack, Kinobits, Loophole Cinema, Tom Cora, La Flibuste ou Le Cube (avec Gaëlle Rouard, Etienne Caire, Christophe Cardoen et Lionel Marchetti).
Le musicien et les cinéastes sont sur scène, faisant face au public. Deux miroirs installés dans la salle reflètent les images sur un écran placé derrière eux. Sons et images sont travaillés en direct. La Cellule d'Intervention développe une idée de jeu entre image et son, le projecteur cinéma étant un instrument comme le magnétophone à bandes par exemple. Du cinéma pour les oreilles, de la musique pour les yeux.
"Il y a chez Metamkine quelque chose de l'ordre de la saturation, de l'inflation, de la surenchère, bref de l'hallucination." Jean-Yves Barbichon
"Metamkine nous offre l'expérience rare d'une musique libérée de toute servitude par rapport au cinéma, un cinéma live projeté comme de la musique, avec des projectionnistes qui manifestent une spontanéité d'instrumentistes". Tom Cora
"Comme moi, ils ne cherchent pas à fonctionner en autarcie mais à minimiser leur dépendance. En manipulant les matériaux, les projecteurs, les morceaux de pellicule, ils pratiquent une forme d'engagement à la fois très nouvelle et en rapport avec la scène alternative américaine des années 60. J'aime leur violence, l'énergie qu'ils déploient pour cela, ce mélange d'amour pour les choses du cinéma et de mépris pour ce qu'il est devenu". Robert Kramer
Christophe Auger & Xavier Quérel, projecteurs cinéma. Jérôme Noetinger, dispositif électroacoustique.
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Christophe AUGER.
Né en 1966. Vit à Cras (38). Etudes de lettres de 1986 à 1988. Technicien de laboratoire photographique professionnel de 1989 à 1995. Photographie expérimentale depuis 1986, formation autodidacte: affiches, pochettes de disques, press-book et expositions. Membre de Art Toung! (programmation de cinéma expérimental au 102, rue d'Alembert à Grenoble) de 1990 à 1995. Depuis 1988, réalise des films expérimentaux en super 8 et 16mm, membre fondateur de la Cellule d'Intervention METAMKINE, performance film & musique en direct. Participe à divers workshops ou stage de formation cinéma pour enfants et adultes. Membre fondateur des "Ateliers MTK", laboratoire cinématographique artisanal à Grenoble de 1992 à 1998. Co-fondateur, en 1999 de l'Atelier "Ad libitum", consacré à la restauration de films expérimentaux et à la recherche sur l'image et le son. Depuis 1995, participe régulièrement à des rencontres improvisées film et musique, membre du “Cube”, installation cinémusiq performance. Depuis 2001, membre du groupe ZUR, qui réalise des installations spectacles ciné-matos-graphique, membre du groupe Mody Bleach, performance film & musique en directe. Depuis 2003, membre du groupe Projos Quartet, performance film en direct.
Xavier Quérel, né en 1966, vit à Grenoble. Après avoir obtenu son baccalauréat (construction mécanique) dans une petite station de ski des Alpes, il s'installe à Grenoble pour étudier les sciences économiques à l'université. Il découvre alors les performances de Metamkine et se lie d'amitié avec eux. Il voit quelques films de Man Ray et Patrick Bokanowski qui le fascinent... et fréquente "le 102", un squat qui organise des concerts de musique inclassable. Depuis cette époque (1988/90), il s'active dans différents domaines du cinéma expérimental :
Pratique de l'improvisation en utilisant la projection cinéma (16mm, super8) et la lumière. Principalement avec "la Cellule d'intervention METAMKINE", performances film / musique. "METAMKINE" a joué dans l'Europe entière, en Amérique du Nord et au Japon. Dans différents autres projets aussi: "Maki" spectacle d'ombres avec lequel il voyage régulièrement au Mali et Sénégal, un solo avec un projecteur 16mm, "Et/Ou" danse-musique-cinéma-lumière, "le Cube" performance film/musique de 12h à l'intérieur d'un cube d'écran...
Mise en place et gestion d'un laboratoire de cinéma artisanal: "l'Atelier MTK", où il est possible de tout faire soimême : prise de vue, développement, tirage de copie, trucages... montage en pellicule 16mm et super8. Anime de nombreux atelier de pratique du cinéma artisanal en école primaire, universités, écoles d'art ou de cinéma.
Participation active à la vie d'un lieu autogéré: "le 102", où sont organisés projections de cinéma expérimental, performances, concerts de musique improvisée/expérimentale, débats...
Jérôme NOETINGER. Né en 1966. Membre fondateur de la Cellule d'Intervention Metamkine. Dirige le label de musique concrète Metamkine et s'occupe d'un catalogue de vente par correspondance spécialisé dans les musiques électroacoustiques et improvisées. Membre du comité de rédaction du magazine trimestriel Revue & Corrigée. Compose des musiques concrètes en studio. Travaille sur scène avec un dispositif électroacoustique regroupant magnétophones à bande, table de mixage, synthétiseurs analogiques, effets, micros-contacts, hauts-parleurs, lecteurs CD et K7… Réalise également des conférences, des animations ou des ateliers… Autres projets : Duo avec Lionel Marchetti depuis 1993. Membre du MIMEO depuis 1997. Quintet Avant avec Lionel Marchetti, Jean Pallandre, Marc Pichelin et Laurent Sassi depuis 1998. Duo avec erikm. Duo avec Fabrice Eglin. Qwat Neum Sixx (avec Daunik Lazro, Sophie Agnel et Michael Nick)…
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"La Cellule d'Intervention Metamkine est formée de Christophe Auger, Xavier Quérel et Jérôme Noetinger. Leurs performances allient projections 16mm et super 8 et musique électroacoustique, dans la grande tradition du "cinéma élargi" et d'un médium cinématographique sculptural (qui n'est pas sans rappeler leurs ancêtres psychédéliques, Ben Van Meter, Andy Warhol et son Exploding Plastic Inevitable). Ils travaillent "au corps" un matériau composé de sons et d'images hétéroclites, parfois trouvés (found footage) ou volés. Sans doute font-ils partie de cette génération d'artistes, aussi bien présents dans le domaine de la musique que des arts visuels, qui se sont donnés pour tâche d'investir totalement leur médium, de le rendre malléable (et expressif) au possible. Il y a chez Metamkine quelque chose de l'ordre de la saturation, de l'inflation, de la surenchère, bref de l'hallucination. Mais ils parviennent toujours à déjouer, parfois avec humour, toute interprétation ou comparaison hâtive. Leurs interventions ne constituent ni une déconstruction manichéenne (ou conceptuelle) du médium audiovisuel, ni une expérience post-psychédélique, ni même une dérive purement plastique du cinéma expérimental."
Jean-Yves Barbichon, Nov'Art n°11, juillet-août 1993.
"Pour bien comprendre Metamkine, il me semble qu'il faut les replacer dans leur environnement culturel et artistique. Par Jérôme Noetinger, Metamkine est aussi un label et un distributeur de disques de référence dans le monde des musiques nouvelles. Revue & Corrigée, l'un des meilleurs magazines dédiés aux musiques dites nouvelles et expérimentales est porté par le même Jérôme. Metamkine, c'est aussi les membres piliers de Art Toung !, l'association programmatrice de cinéma expérimental et de concerts au 102, lieu culturel indépendant, autofinancé et incontournable de Grenoble. Et derrière les deux cinéastes se cache le labo MTK qui permet aux "amateurs" de réaliser eux-mêmes les étapes si importantes du développement et du tripatouillement chimique de l'émulsion cinématographique. C'est ce même labo MTK qui est à l'origine de la dynamique qui se crée en France depuis plus d'un an chez les cinéastes pour concrétiser d'autres laboratoires de ce type.
[…]
Metamkine, c'est avant tout un travail sur le médium cinématographique qui s'inscrit dans la tradition de l' "Expended cinema" ou cinéma élargi. Mais pour eux les problèmes théoriques et historiques restent annexes. Leur pratique ne naît pas d'une théorisation ou de l'existence du cinéma expérimental dont l'histoire et les mouvances actuelles ne leur sont apparues qu'après les débuts. Pourtant leur travail, dans son ensemble, est sûrement un des plus riches et des plus moteurs en France.
Les deux cinéastes s'affichent comme des joueurs de projecteurs qui interprètent des pièces préparées, comme peut le faire un guitariste. L'instrument, ici le projecteur, se joue avec des photogrammes, des filtres colorés, des prismes, des perceuses ou encore des produits chimiques. Durant la réalisation d'une pièce, Metamkine joue de ses images, de found footage et, comme point nodal des précédents, de flux lumineux au sens large. En effet, la variation à partir de la lumière a toujours été présente et, peut-être depuis leur rencontre avec Loophole Cinema, la lumière du projecteur se conjugue avec des allumettes ou des lampes de poche. La multiplicité des sources lumineuses et leur diffusion grâce à un système de miroir fait de l'écran un espace où interfèrent, se superposent et s'accouplent des images et de la lumière. C'est ici que l'on peut introduire la notion de polyptyque. Le film se structure comme des panneaux qui se confrontent ou qui s'ouvrent vers un autre ensemble. A ce titre, l'expérience Kinobits prolonge de manière évidente cette idée de polyptyque à plusieurs ouvertures.
En symbiose, Jérôme Noetinger utilise son impressionnant et facétieux ensemble sonore. Des boucles magnétiques, des synthétiseurs analogiques et de nombreux bricolages, de la machine à café à la roue de vélo affublées de micro-contacts, se mixent avec des éléments préenregistrés. La puissance de l'interprétation sonore n'est jamais dans une virtuosité d'accompagnement des images. A contrario de la majorité des productions cinématographiques dont le son est bâclé et relégué à un rôle secondaire d'ambiance, Metamkine fusionne les images et le son. Conçu de manière semblable aux accords visuels, le film gagne une unité qui s'empare du spectateur. L'origine de cette intelligence de création est à chercher dans la connaissance du médium : les trois membres de Metamkine travaillent avec une culture musicale ou de cinéma expérimental quasi-similaire. Le questionnement de la matière de l'autre devient plus naturel et le film peut se construire en toute connaissance de cause.
A cet égard, depuis le début de l'année, il m'a été possible d'apprécier leurs collaborations avec Kinobits et Nachtluft. Si la première semble prolonger le travail de Metamkine vers le polyptyque à plusieurs ouvertures (un autre élément visuel intéressant est la réutilisation d'images utilisées dans d'anciennes pièces) et l'exploration sonore articulée autour de l'outil numérique, la seconde la transcende.
Chez Nachtluft / Metamkine, la lumière et le son envahissent l'espace. Le polyptyque sonore et visuel s'implante. Du craquement des allumettes des différents interprètes aux boucles des cinéastes, le son s'impose et tourne afin de prendre possession d'un espace clos par les images. Le spectateur est pris dans un environnement qui le renvoie à lui-même.
Par la force des choses, Metamkine explore un pan de notre espace et nous met à l'épreuve dans des expériences qui nous subjuguent."
Jean-Damien Collin, Limelight N°53, octobre 1996.
"Si nous faisions un recensement des autodidactes, nous découvririons certainement que leurs rangs regorgent de musiciens. En dehors du milieu classique, on les trouve aussi parmi les innovateurs célèbres (tels Ornette Coleman et Jimi Hendrix). Et si le mouvement punk de la fin des années soixante-dix ne vous a pas laissé une forte impression, il a cependant démontré une thèse importante : pas besoin d'être virtuose pour faire de la musique. C'est-à-dire qu'on n'a pas besoin d'être virtuose pour faire de la vraie musique, une musique qui ait un impact.
Selon sa propre définition, Metamkine se désigne comme une cellule d'intervention. Dans les deux biographies de ses trois membres, il est noté : "formation autodidacte". Leurs performances ont un impact viscéral qui se garde d'oublier l'intelligence. Leur matériau, c'est le film et le son. Mais ils ne refusent pas qu'on leur dise qu'ils ressemblent à un groupe musical. Sur scène, ils font face au public ; ils ont des instruments dont ils "jouent" et c'est par l'intermédiaire de ces instruments qu'ils sont en interaction les uns avec les autres ; ils répètent des morceaux, ils improvisent ; ils utilisent le rythme, l'orchestration ; ils ont joué dans des clubs de rock, des festivals de jazz, des salles de concert, ils collaborent de temps en temps avec d'autres musiciens. Comme ils n'utilisent pas d'instruments de musique "normaux", il est absurde de se poser la question de la virtuosité. Mais pour qui les a vus en public, il est évident qu'ils savent exactement ce qu'ils font.
Basé à Grenoble, Metamkine est un trio créé en 1987, comprend deux cinéastes et un musicien. Christophe Auger et Xavier Quérel manient des projecteurs super 8 et 16mm pointés en direction du public, où l'image jaillit de deux grands miroirs ou plus, avant de parvenir sur l'écran qui est au fond de la scène. Le son provient de synthétiseurs analogiques, de bandes en boucles et des objets amplifiés de Jérôme Noetinger. Selon leurs termes, "ce n'est pas un travail théorique. C'est totalement empirique. L'un de nous fait le son, les autres, les images. Le moment important, c'est la confrontation sur scène."
Metamkine nous offre l'expérience rare d'une musique libérée de toute servitude par rapport au cinéma, un cinéma live projeté comme de la musique, avec des projectionnistes qui manifestent une spontanéité d'instrumentistes. Cet esprit d'improvisation abouti est mis au service de compositions extrêmement répétées et l'empathie sur scène vise aussi souvent la subversion des attentes que l'affirmation joyeuse d'un travail de musique collective. Il est évident que Metamkine appartient à la tradition du cinéma expérimental, une tradition qu'ils contribuent à approfondir en jouant comme un groupe musical."
Tom Cora, programme Festival Klangspuren, Schwaz (Autriche), septembre 1996. Traduit de l'anglais par Cécile Wajsbrot.